Un ancien a dit : « En toute épreuve, ne blâme pas les autres, mais toi seul, disant : C’est à cause de mes fautes que cela arrive. »
Dn 14, 27-30 — Les Babyloniens, saisis d’une vive indignation, se rassemblèrent contre le roi et dirent: « Le roi est devenu juif ; il a détruit Bel, fait mourir le dragon et massacrer les prêtres. » Ils vinrent donc trouver le roi et lui dirent: « Livre-nous Daniel ; sinon, nous te ferons mourir, toi et ta maison ». Le roi vit qu’ils se jetaient sur lui avec violence ; cédant à la nécessité, il leur livra Daniel. Ils le jetèrent dans la fosse aux lions, et il y demeura six jours.
Dn 14, 39-42 — Le septième jour, le roi vint pour pleurer Daniel ; étant venu vers la fosse, il regarda, et voici que Daniel était assis au milieu des lions. Il cria à haute voix et dit : « Vous êtes grand, Seigneur, Dieu de Daniel, et il n’y en a point d’autre que vous ! » Et il le retira de la fosse aux lions. Puis il fit jeter dans la fosse ceux qui avaient voulu le perdre, et ils furent dévorés sous ses yeux, en un instant. Alors le roi dit : « Que tous les habitants de la terre entière craignent le Dieu de Daniel, car c’est lui qui est le Sauveur, qui fait des signes et des prodiges sur la terre, lui qui a délivré Daniel de la fosse aux lions ! »
Commentaire mystique de Rupert de Deutz (résumé par Dom de Monléon)
La jalousie des satrapes et des princes contre Daniel, figurait à l’avance celle dont seraient animés un jour les princes des prêtres et les chefs du peuple contre le Christ. Eux aussi chercheront à le prendre en défaut, ex latere regis, c’est-à-dire de flanc, avec traîtrise, en lui tendant des pièges sur la question du roi ; en disant, par exemple : « Est-il permis de payer le cens à César ? » Quelle aubaine pour eux, si Jésus avait dit que c’était défendu ! L’autorité romaine n’aurait pas manqué aussitôt de le faire arrêter et mettre à mort, ou, au moins, de le réduire à l’impuissance. Mais Jésus se gardait de dire rien de pareil, et il était impossible de recueillir le plus petit grief contre lui. Cependant, tout en rendant à César ce qui est à César, il ne cessait de rendre à Dieu ce qui est à Dieu, sans souci de la loi des Mèdes et des Perses, c’est-à-dire sans s’embarrasser des innombrables traditions forgées par les Scribes et les Pharisiens. Il continuait de prier à sa manière, dans le haut de sa maison, c’est-à-dire en esprit et en vérité (Io 4, 23), et toutes fenêtres ouvertes, sans rien dissimuler de sa doctrine (Io 18, 12).
Alors ses ennemis, exaspérés, comme ceux de Daniel, réclament sa mort. L’autorité romaine, en la personne de Pilate, essaie, comme Darius, de leur résister, mais les forcenés le menacent : « Si tu le laisses aller, tu n’es pas l’ami de César ! » (Io 19, 12). Et Pilate cède, comme Darius a cédé ; et Jésus est condamné à mort, exécuté, mis en terre…
Mais bientôt il ressort vivant du tombeau comme Daniel est sorti indemne de la fosse. Les lions, contraints de respecter la victime qu’on leur a jetée, se sont vengés sur ses ennemis ; et de même la croix, qui n’a pu triompher du Christ, puisqu’il a échappé à la mort, se venge sur ceux qui l’ont condamné : les Juifs seront crucifiés par dizaines de milliers autour des murs de la Ville Sainte, lorsque Titus viendra en faire le siège.
Et de même que Darius, après avoir accepté que Daniel soit condamné, l’appellera hors de la fosse, et proclamera la transcendance du Dieu qu’il sert ; de même la puissance romaine, après avoir laissé mourir le Christ, l’invitera un jour, par l’entremise de Constantin, à sortir de l’obscurité des catacombes et obligera tous les peuples à adorer le Dieu qu’il est venu faire connaître aux hommes.
commentaire de Dom Delatte
Cet enseignement du Seigneur fut donné le dernier jour de la fête [des Tabernacles], le huitième probablement (Lv 23, 36), qui était particulièrement solennel et avait pour dessein de rappeler l’entrée dans la terre promise. Le temple de Jérusalem n’avait pas d’eau vive. Durant chacun des jours de fête, le prêtre se rendait, avec une procession nombreuse, à la piscine de Siloé, au pied de la colline d’Ophel. Il y puisait, avec une urne d’or, de l’eau qu’il reportait au temple et versait au pied de l’autel des holocaustes, tandis que les chœurs chantaient le Hallel (Psaumes 113 à 117). Ainsi, la fête des Tabernacles était une réédition symbolique de ce qui s’était passé au désert : les tentes, l’eau jaillie du rocher sous la baguette de Moïse. Peut-être l’eau avait-elle aussi une signification présente : elle devait être offerte à Dieu et obtenir sa bénédiction pour les semailles nouvelles ; mais elle avait sûrement une signification prophétique, comme nous l’apprend le Seigneur lui-même. À l’occasion d’un rite liturgique, bien connu des foules, il reprend et complète l’enseignement déjà donné à la Samaritaine. Il s’exprime d’une voix forte, afin que parvienne à tous l’invitation divine.
« Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive. Celui qui croit en moi, comme a dit l’Écriture, des fleuves d’eau vive jailliront de son sein. » Venir au Seigneur, c’est reconnaître en lui le Fils de Dieu ; avoir soif, être altéré, c’est porter en soi une âme religieuse et désireuse de justice. En attendant le rassasiement de la vision, il n’existe dans le désert de cette vie, pour nous désaltérer et apaiser notre faim, d’autre procédé que de nous attacher au Seigneur par la foi. Nous sommes des êtres pauvres, incomplets, qui ne seront achevés que par Dieu même. Notre grande misère a besoin de lui : il est le seul qui la puisse combler. La richesse de Dieu vient à propos. On y puise, dans le Christ, en croyant en lui. Est-il exact de dire qu’on y puise ? La promesse du Seigneur est plus haute. Au chapitre 47 de sa prophétie, Ezéchiel s’était plu à montrer le temple nouveau comme inondé d’eau vive, au lieu de n’être rafraîchi que par l’eau lointaine de Siloé. Le Seigneur fait allusion, soit à cette prophétie, soit à celles d’Isaïe (Is 44, 8 et Is 58, 11) ou de Zacharie (Za 14, 8), pour montrer comment et avec quelle abondance divine seront désaltérés ceux que la foi unit au Fils de Dieu. Ils portent en eux, dans leur cœur, la source même de l’eau vive, la source qui jaillit et qui coule éternellement.
Et l’évangéliste ajoute un bref commentaire. En parlant ainsi, le Seigneur signifiait l’Esprit de Dieu que devaient recevoir ceux qui croiraient en lui, Jésus. C’est l’Esprit-Saint qui est cette source d’eau vive, intérieure à nous ; c’est lui qui comble tous les désirs de notre cœur en nous attachant à Notre-Seigneur Jésus-Christ ; c’est lui qui verse en nous la plénitude de la vie divine. La vie surnaturelle est donc toute dans une relation au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit.
Prières
Oraison
Nous vous en supplions, Seigneur, faites que nos jeûnes vous soient agréables ; afin qu’expiant nos péchés, ils nous rendent dignes de votre grâce, et qu’ils nous servent de remèdes pour la vie éternelle.
Oratio
Nostra tibi, Dómine, quæsumus, sint accepta ieiúnia : quæ nos et expiándo grátia tua dignos effíciant ; et ad remédia perdúcant ætérna. Per Dóminum.
Oraison
Nous vous en supplions, Seigneur, donnez-nous la persévérance dans la soumission à votre volonté, afin que, de nos jours, le peuple qui vous sert, augmente en mérite et en nombre.
Oratio
Da nobis, quæsumus, Dómine : perseverántem in tua voluntáte famulátum ; ut in diébus nostris, et mérito et número, pópulus tibi sérviens augeátur. Per Dóminum nostrum.
Prière de Saint Anselme (1033-1109)
Seigneur, mon Dieu, donnez à mon cœur de vous désirer ; en vous désirant, de vous chercher ; en vous cherchant, de vous trouver ; en vous trouvant, de vous aimer ; et en vous aimant, de racheter mes fautes ; et une fois rachetées, de ne plus les commettre. Seigneur, mon Dieu, donnez à mon cœur la pénitence, à mon esprit le repentir, à mes yeux la source des larmes, et à mes mains la largesse de l’aumône. Vous qui êtes mon Roi, éteignez en moi les désirs de la chair, et allumez le feu de votre amour. Vous qui êtes mon Rédempteur, chassez de moi l’esprit d’orgueil, et que votre bienveillance m’accorde l’esprit de votre humilité. Vous qui êtes mon Sauveur, écartez de moi la fureur de la colère, et que votre bonté me concède le bouclier de la patience. Vous qui êtes mon Créateur, déracinez de mon âme la rancœur, pour y répandre la douceur d’esprit. Donnez-moi, Père très bon, une foi solide, une espérance assurée et une charité sans faille. Vous qui êtes mon guide, écartez de moi la vanité de l’âme, l’inconstance de l’esprit, l’égarement du cœur, les flatteries de la bouche, la fierté du regard. Ô Dieu de miséricorde, je vous le demande par votre Fils bien-aimé, donnez-moi de vivre la miséricorde, l’application à la piété, la compassion avec les affligés et le partage avec les pauvres.
Antienne
Ã. Tempus meum nondum advénit, tempus autem vestrum semper est parátum.
Ã. Mon temps n’est pas encore venu, mais votre temps est toujours prêt.