Annonce du Martyrologe Romain

Le Dimanche des Palmes, jour où Notre-Seigneur Jésus-Christ, monté sur le petit d’une ânesse, selon la prophétie de Zacharie, entra à Jérusalem, tandis que la foule, des branches de palmier à la main, se portait à sa rencontre.

Les branches de palmier sont les louanges et sont l’emblème de la victoire ; car, en mourant, le Seigneur allait vaincre la mort, et, par sa croix, triompher du diable, prince de la mort.

Saint Augustin

Sentiments chrétiens par rapport à la Passion du Christ

par R. P. Joseph-Marie Mercier

L’ovation des Rameaux (Mt 21, 1-9) :
commentaire de Dom Paul Delatte
À mesure que nous avançons vers la Passion, le récit des évangélistes, habituellement sommaire, devient tellement abondant que l’on peut suivre le Seigneur pas à pas. Il passa probablement à Béthanie la nuit du samedi au dimanche. Le lendemain, peut-être dans l’après-midi, il reprit sa marche vers Jérusalem, distante de trois kilomètres environ. Avec ses disciples, c’est déjà tout un cortège de pèlerins et de Juifs qui l’accompagnent. Bientôt la nouvelle de son arrivée parvient à Jérusalem ; et une foule de personnes, venues dans la ville à l’occasion de la Pâque, sortent au-devant de lui. Les deux cortèges vont se rencontrer, et une grande ovation se prépare. Le Seigneur, qui, jusqu’à ce moment, ne s’était jamais prêté, en Galilée, aux manifestations et à la reconnaissance populaire, condescend aujourd’hui, organise même ce triomphe du Messie qui va mourir.

En approchant de Bethphagé, un village situé sur les pentes orientales du mont des Oliviers, il envoie deux de ses disciples faire les préparatifs voulus par Dieu. « Allez, leur dit-il, au village qui est devant vous, — Bethphagé sans doute ; — aussitôt entrés, vous trouverez un ânon (avec l’ânesse, note saint Matthieu), un ânon qui n’a encore été monté par personne ; détachez-les et amenez-les moi. Et si quelqu’un vous demande : Que faites-vous là ? Pourquoi détachez-vous ces montures ? vous répondrez : C’est parce que le Seigneur en a besoin ; mais il les renverra aussitôt (ou, selon la traduction commune : et on vous laissera faire). » Toutes choses se passèrent exactement comme le Seigneur l’avait dit. Notons le caractère vivant du récit et l’extrême précision de détails, surtout chez saint Marc. Les deux disciples s’en allèrent au hameau désigné, trouvèrent l’ânon attaché près d’une porte, au dehors, sur la rue, et se mirent en devoir de le délier. Des gens qui se trouvaient là, — les propriétaires, précise saint Luc, — leur dirent : « Que faites-vous ? pourquoi détachez-vous l’ânon ? » Ils répondirent simplement, selon leurs instructions : « Parce que le Seigneur en a besoin » ; et on les laissa faire. Et, lorsqu’ils furent revenus près de leur Maître, les disciples disposèrent leurs manteaux sur les deux animaux ; et le Seigneur ayant choisi l’ânon comme monture, ils l’aidèrent à s’y installer.

Or toutes ces choses s’accomplissaient, ne manque pas de remarquer saint Matthieu, afin que fût réalisée la parole prophétique : « Dites à la fille de Sion, c’est-à-dire à Jérusalem (Is 62, 11) : Voici que votre roi vient à vous, plein de douceur, monté sur un âne, sur le petit de celle qui porte le joug » (Za 9, 9). Saint Jean a relevé, lui aussi, l’accomplissement de cette prophétie messianique. Mais il ajoute que les disciples n’en eurent pas conscience à l’heure même : plus tard seulement, après la glorification du Seigneur et après avoir reçu l’intelligence des Écritures, ils se souvinrent de la prophétie, comprirent qu’elle regardait ce triomphe pacifique de Jésus, et observèrent avec joie qu’ils avaient contribué, à leur insu, à en réaliser la teneur.

Lentement, le Seigneur s’avançait vers la ville sainte. Beaucoup se dépouillaient de leurs manteaux et les étendaient sur le chemin. Nous savons, par le récit de ce qui se fit à l’intronisation de Jéhu (4 Rg 9, 13), que jeter ses vêtements sous les pieds d’un homme, c’était le reconnaître comme roi et seigneur. D’autres arrachent aux arbres leurs rameaux, vont couper de la verdure dans les champs voisins, et en jonchent le parcours, afin de préparer au Seigneur un chemin qui fût bien à lui et qui n’eût été foulé par personne. Devant le Seigneur et derrière lui marche une foule mêlée de Galiléens et de Juifs, portant en main, dit saint Jean, « les branches des palmiers », c’est-à-dire les tiges cueillies çà et là en cours de route (cf. 1 Mcc 13, 51 ; 2 Mcc 10, 7). Saint Luc a noté l’endroit précis où retentirent les acclamations enthousiastes de la foule : on descendait la pente du mont des Oliviers. Tous, mais ceux-là surtout qui avaient contemplé les nombreux miracles du Seigneur, et notamment, dit saint Jean, la résurrection de Lazare, glorifiaient Dieu à haute voix : « Hosanna ! Hosanna au Fils de David, au roi d’Israël ! Béni celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni soit l’avènement du royaume de David notre père ! Hosanna au plus haut des cieux ! » Et l’on entendit même, selon saint Luc, un écho du chant angélique qui avait retenti autrefois sur le berceau du Sauveur : « Paix dans le ciel, et gloire au plus haut des cieux ! »

Hosanna n’est pas simplement une interjection, c’est encore une prière : « Sauvez-nous ! » C’est un appel à Dieu pour qu’il protège et sauve la nation : ici, pour qu’il donne longue vie et règne au Messie. Pendant la fête des Tabernacles, les Juifs répétaient sans fin l’Hosanna en agitant des palmes, tandis que les anneaux de la procession liturgique se déroulaient autour de l’autel des holocaustes. Le Psaume 117, auquel est emprunté le « Benedictus qui venit in nomine Domini », était, lui aussi, un chant de procession triomphale ; il avait sa place dans la liturgie des Tabernacles et les Juifs le regardaient comme messianique. Selon leur foi traditionnelle, le règne du Messie devait être la consécration du régime théocratique ; or voici que le nouveau roi se présente au nom et avec l’autorité de Dieu, et pour accomplir son œuvre. Le voilà donc revenu, le règne de David, avec les gloires d’autrefois ! Que le chant de l’Hosanna retentisse jusqu’au plus haut des cieux !

Jésus, l’ânesse et l’ânon :
commentaire allégorique de Saint Ambroise (in Lc IX)

Nous lisons selon Matthieu qu’il y avait ânesse et ânon ; de la sorte, comme dans les deux humains l’un et l’autre sexe avait été expulsé, dans les deux animaux l’un et l’autre sexe est rappelé. D’une part donc l’ânesse figurait Ève, mère d’erreur ; d’autre part son petit représentait l’ensemble du peuple des Gentils ; aussi est-ce le petit de l’ânesse qui sert de monture. Et réellement « personne ne l’a monté », car personne avant le Christ n’avait appelé à l’Eglise les peuples des nations ; aussi bien avez-vous lu en Marc : « Que nul homme encore n’a monté. » (Mc 11, 2). Or il était tenu captif par les liens de l’incrédulité, livré au maître méchant à qui son égarement l’avait asservi, mais qui ne pouvait revendiquer ce domaine, l’ayant obtenu non par droit de nature, mais par une faute. Marc mentionne : « Lié devant la porte » (Mc 11, 4) : car quiconque n’est pas dans le Christ est dehors, dans la rue ; mais qui est dans le Christ n’est pas au-dehors. « Sur le passage », ajoute-t-il (Ib.) : là, pas de propriété assurée, pas de crèche, pas d’aliments, pas d’étable. Misérable esclavage, dont la condition est indécise : on a bien des maîtres, faute d’en avoir un. Les autres attachent pour posséder ; Jésus délie pour retenir : les dons, Il le sait bien, sont plus forts que les liens.

Le Maître du monde donc n’a pas mis son plaisir à faire porter son corps visible sur l’échine d’une ânesse ; mais Il voulait, par un mystérieux secret, sceller l’intime de notre âme, s’installer au fond des cœurs, s’y asseoir, cavalier mystique, y prendre place comme corporellement par sa divinité, réglant les pas de l’âme, bridant les soubresauts de la chair, et habituer le peuple des Gentils à cette aimante direction afin de discipliner ses sentiments.

Heureux ceux qui ont accueilli sur le dos de leur âme un tel cavalier ! Heureux vraiment ceux dont la bouche, pour ne pas se répandre en bavardages, a été retenue par la bride du Verbe céleste ! Quelle est cette bride, mes frères ? Qui m’enseignera comment elle serre ou délie les lèvres des hommes ? Il m’a fait voir cette bride, celui qui a dit : « afin que la parole me soit donnée pour ouvrir mes lèvres » (Eph 6, 19). La parole est donc bride, la parole est aiguillon ; aussi « il vous est fâcheux de regimber contre l’aiguillon » (Act 9, 5 ; 26, 14). Il nous a donc appris à ouvrir notre cœur, à endurer l’aiguillon, à porter le joug ; qu’un autre nous apprenne encore à supporter le frein de la langue : car plus rare est la vertu du silence que celle de la parole. Oui, qu’il nous l’apprenne, celui qui, comme muet, n’a pas ouvert la bouche contre l’imposture, prêt pour les fouets (Ps 37, 14) et ne refusant pas les coups, pour être une docile monture à Dieu.

Apprenez d’un familier de Dieu à porter le Christ, puisque Lui vous a porté le premier, quand, pasteur, Il ramenait la brebis égarée (Lc 15, 6) ; apprenez à prêter de bonne grâce le dos de votre âme ; apprenez à être sous le Christ, afin de pouvoir être au-dessus du monde. Ce n’est pas le premier venu qui porte aisément le Christ, mais celui qui peut dire : « Je me suis courbé et abaissé à l’extrême ; je rugissais sous la plainte de mon cœur » (Ps 37, 9).

Et si vous souhaitez ne pas trébucher, posez sur les vêtements des saints vos pas purifiés ; prenez garde en effet d’avancer les pieds boueux. Gardez-vous de prendre la traverse, abandonnant le chemin jonché pour vous, les voies des Prophètes : car pour ménager aux nations qui viendraient une marche plus assurée, ceux qui précédèrent Jésus ont couvert le chemin de leurs propres vêtements, jusqu’au temple de Dieu. Pour vous faire avancer sans heurt, les disciples du Seigneur, dépouillant le vêtement de leur corps, vous ont, par leur martyre, frayé la voie à travers les foules hostiles.

Si pourtant quelqu’un veut l’entendre ainsi, nous ne contestons pas que l’ânon marchait également sur les vêtements des Juifs. Mais que veulent dire ces rameaux brisés ? À coup sûr, ils embarrassent habituellement les pas qui les foulent. Je serais bien perplexe, si plus haut le bon jardinier du monde entier ne m’avait appris que « déjà la cognée est mise aux racines des arbres » (Lc 3, 9) : à la venue du Seigneur Sauveur elle abattra les stériles, et jonchera le sol de la vaine parure des nations sans fruit, que fouleront les pas des fidèles, afin que, renouvelés dans leur âme et esprit, les peuples puissent, comme les pousses de nouveaux plants, surgir sur les vieilles souches.

Ne méprisez donc pas cet ânon : de même que la peau des brebis peut couvrir des loups rapaces (Mt 7, 15), de même inversement un cœur humain peut se cacher sous les dehors d’une bête ; car sous le vêtement du corps, qui nous est commun avec les animaux, vit l’âme que Dieu remplit. Qu’il y ait là une figure des hommes, saint Jean l’a mis en pleine clarté, quand il ajoute qu’ils prirent en mains la fleur des palmiers (Io 12, 13) ; car « le juste fleurira comme le palmier » (Ps 91, 13). Ainsi, à l’approche du Christ, se dressaient, dépassant les épaules des hommes, les étendards de la justice et les emblèmes des triomphes. Pourquoi la foule s’étonne-t-elle du mystère qui s’accomplit ? Bien qu’ignorant ce qui l’étonne, elle admire pourtant que sur cet ânon la Sagesse ait pris place, la vertu soit assise, la justice établie. Ne méprisez pas non plus cette ânesse : jadis elle a vu l’ange de Dieu, qu’un homme ne pouvait voir (Nm 22, 23 ssq.). Elle a vu, elle s’est rangée, elle a parlé, pour vous apprendre que dans les temps qui suivraient, à l’avènement du Grand Ange (Is 9, 6) de Dieu, les Gentils, ânes jusque-là, parleraient.

Prières

Oraison

Seigneur Jésus-Christ, notre Roi et notre Rédempteur, en votre honneur nous portons ces rameaux et nous avons chanté toutes ces louanges solennelles : accordez-nous favorablement que, partout où seront portés ces rameaux, descende la grâce de votre bénédiction et, qu’après avoir triomphé de toute malice et de toute tromperie des démons, votre droite protège ceux qu’elle a racheté.

Oratio

Dómine Iesu Christe, Rex ac Redémptor noster, in cuius honórem, hos ramos gestántes, solémnes laudes decantávimus : concéde propítius ; ut, quocúmque hi rami deportáti fúerint, ibi tuæ benedictiónis grátia descéndat, et, quavis dæmonum iniquitáte vel illusióne profligáta, déxtera tua prótegat, quos redémit : Qui vivis et regnas in sæcula sæculórum.

Oraison

Dieu tout-puissant et éternel, qui avez voulu que notre Sauveur prît la chair humaine et supportât les tourments de la croix, afin de servir de modèle d’humilité au genre humain, accordez-nous, dans votre bonté, d’être, à son exemple, toujours courageux dans les épreuves et de mériter par là d’avoir part à sa résurrection. Par le même Jésus-Christ.

Oratio

Omnípotens sempitérne Deus, qui humáno generi, ad imitandum humilitátis exémplum, Salvatórem nostrum carnem súmere et crucem subíre fecísti : concéde propítius ; ut et patiéntiæ ipsíus habére documénta et resurrectiónis consórtia mereámur. Per eúndem Dóminum nostrum.

Antiennes

Ã. Púeri Hebræórum, tolléntes ramos olivárum, obviavérunt Dómino, clamántes et dicéntes : Hosánna in excélsis.

Ã. Les enfants des Hébreux, portant des branches d’olivier, allèrent au-devant du Seigneur ; ils criaient et disaient : Hosanna au plus haut des cieux.

Antienne grégorienne “Pueri hebræorum tollentes”

par R. P. Joseph-Marie Mercier

Ã. Púeri Hebræórum vestiménta prosternébant in via et clamábant, dicéntes : Hosánna fílio David : benedíctus, qui venit in nómine Dómini.

Ã. Les enfants des Hébreux étendaient leurs vêtements sur le chemin ; ils criaient et disaient : Hosanna au fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !

Antienne grégorienne “Pueri hebræorum vestimenta”

par R. P. Joseph-Marie Mercier

Antiennes Pueri Hebreorum

La Semaine Sainte de Pie XII : “Semaine Sainte de Bugnini” ?

Les principes théologiques et canoniques ainsi que l’étude des documents historiques permettent de démontrer que le P. Annibale Bugnini n’a aucune influence dans les réformes liturgiques effectuées avant Vatican 2, spécialement sur la réforme de la Semaine Sainte approuvée par le Pape Pie XII en 1955.

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