Note sur le jeûne et l’abstinence
La loi ecclésiastique du jeûne oblige tous les fidèles, non excusés ou dispensés, qui ont entre 21 et 60 ans. La loi de l’abstinence de viande oblige dès l’âge de 7 ans.
Le jeûne consiste à faire un seul repas par jour, mais deux petites collations, que les théologiens limitent à 60 grammes le matin et 250 grammes le soir, sont tolérées. Pendant le Carême, on doit jeûner tous les jours sauf les dimanches, et on doit s’abstenir de viande le mercredi des Cendres (14 février 2024), le mercredi des Quatre-Temps (21 février 2024), et tous les vendredis et samedis.
Il a été parlé, dans les pages qui précèdent, de l’avènement futur, de l’arrivée du maître, de la venue de l’époux ; l’évangile nous dit maintenant ce qui suivra cette apparition du Seigneur. Désormais, ce n’est plus le procédé de la parabole, mais, en clair, toute la scène du dernier jugement. Le Fils de l’homme viendra : c’est à lui que « le Père a remis le soin de juger ». Son premier avènement a eu lieu dans l’humilité ; le second se fera dans l’autorité et la majesté souveraines. Toute la cour angélique sera autour de lui, car elle forme son cortège habituel, et elle est trop intéressée à ce qui se passe (Zac 14, 5 ; Mt 16, 27). Il s’assiéra sur le trône de sa gloire. Toutes les nations, et pas simplement le peuple juif, seront assemblées et comparaîtront devant lui. Il mettra à part, dans cette multitude, comme le pasteur dans le troupeau qui lui appartient (Ez 34, 17), les brebis d’un côté, les boucs de l’autre ; celles-là à droite, ceux-ci à gauche.
Alors le roi dira à ceux qui sont à sa droite : Venez, approchez, les bénis de mon Père… C’est du Père que vient l’élection, et la prédestination, et la justification, et la gloire. Le temps est fini : c’est l’heure du salaire. Entrez en possession, à titre d’héritiers et de fils, du Royaume qui vous a été préparé dès l’origine du monde. — Un royaume. Seigneur ! Quelle disproportion entre le travail et le salaire ! Nous ne saurons d’ailleurs qu’en ce jour-là en quoi consiste ce Royaume. On s’est servi seulement des termes les plus glorieux de la langue humaine, afin de nous laisser pressentir ce que nous prépare le cœur de Dieu. Et le Seigneur juge bon de motiver sa sentence : « Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais sans abri, et vous m’avez recueilli ; sans vêtement, et vous avez couvert ma nudité ; malade, et vous m’avez visité ; prisonnier, et vous êtes venu vers moi. » — Mais les justes, surpris, se demanderont s’il n’y a pas erreur : « Quand est-ce donc que l’occasion nous fut offerte ainsi de mettre à votre service, Seigneur, notre temps, nos biens, notre personne ? »
Et le roi leur répondra : « En vérité, je vous le dis, toutes les fois que vous avez fait du bien à l’un de ces hommes qui sont mes frères, fût-il le plus petit, le plus humble, c’est à moi-même que vous l’avez fait. » Le Seigneur rappelle une doctrine déjà connue (Mt 10, 40-42 ; Mc 9, 36 et 41). On peut s’étonner que la matière du jugement soit aussi limitée : pourquoi n’avoir rien dit des autres devoirs, indispensables pourtant, eux aussi ? Pourquoi, notamment, n’avoir pas parlé de celui d’aimer Dieu ? C’est que la charité fraternelle résume tout ; c’est qu’elle est la marque spéciale de notre vie surnaturelle. Laissé à lui-même, l’homme est égoïste : seules la grâce de Dieu et l’union avec lui parviennent à ruiner en nous l’égoïsme foncier de la nature. Et en se substituant lui-même au plus petit d’entre nous, le Seigneur nous rappelle l’unité où sont établies, en lui, toutes les âmes régénérées. Toutes sont à lui, toutes vivent de sa vie : nous ne sommes plus en relation qu’avec le Seigneur ; dans la personne de nos frères, de ses frères, c’est lui toujours que nous touchons. Nul ne saurait être exclu de notre charité surnaturelle, puisque Jésus est le Sauveur de tous et que l’humanité entière est appelée à son mystère d’unité. On comprend que le jugement suprême ne veuille retenir que ces conditions essentielles du christianisme, et que le sort éternel de chacun soit subordonné à sa collaboration personnelle au programme unique de Dieu.
Le Seigneur s’adresse ensuite au groupe de gauche. La formule est calquée sur celle que nous venons de lire, mais inverse et terrible. « Éloignez-vous de moi, maudits… » : les bénis sont « les bénis de mon Père », mais les maudits sont simplement des maudits ; ils ont aimé la malédiction, comme dit le Psalmiste (118, 18), et repoussé la bénédiction qui s’offrait. Au lieu du Royaume, le feu éternel, — qui n’est pas dit « préparé dès l’origine du monde », parce qu’il n’était pas créé pour la race humaine, mais pour le diable et ses anges. Et, détail remarquable, en assignant le motif du châtiment, le Seigneur ne reproche pas ici aux réprouvés d’avoir fait le mal ; il les blâme de n’avoir pas fait le bien, le bien éminent de la charité fraternelle, celui qui implique et résume tous les préceptes : « Car j’ai eu faim, et vous ne m’avez pas donné à manger, etc.. » Les réprouvés s’étonnent, à leur tour : Seigneur, quand est-ce que nous avons omis de vous rendre ces devoirs de miséricorde ? » Ici encore, le dialogue n’a qu’un dessein : rendre plus dramatique et plus pressante la leçon donnée. « Je vous le dis en vérité, répond le Seigneur, chaque fois que vous avez omis d’être charitable envers l’un de ces petits, c’est moi-même que vous avez déçu et trompé. »
Alors chacun s’en ira en son lieu : les méchants à un supplice éternel, les justes à une vie éternelle. (Cf. Dn 12, 2.) Qu’est-il besoin d’ajouter à ces simples paroles de l’évangile ? Aussi vrai que Dieu est Dieu, nous nous trouverons un jour en face du Fils de l’homme ; nous entendrons tomber de ses lèvres notre sentence ; avec lui, à jamais, ceux-là seuls demeureront qui auront attendu, dans la fidélité, son avènement ; ceux qui l’auront cherché, servi, aimé dans la personne de ses membres.
Prières
Oraison
Convertissez-nous, ô Dieu, notre Sauveur ; et, afin que le jeûne du Carême nous soit utile, instruisez nos âmes au moyen de célestes enseignements.
Oratio
Convérte nos, Deus, salutáris noster : et, ut nobis ieiúnium quadragesimále profíciat, mentes nostras cæléstibus ínstrue disciplínis. Per Dóminum.
Oraison
Nous vous en supplions, Seigneur, brisez les liens dont nous chargent nos fautes, et détournez miséricordieusement de nous ce que nous avons mérité pour elles.
Oratio
Absólve, quæsumus, Dómine, nostrórum víncula peccatórum : et, quidquid pro eis merémur, propitiátus avérte. Per Dóminum.
Prière de Dom Eugène Vandeur (1875-1967)
Votre loi, Seigneur Jésus, c’est la Charité, ô vous qui êtes l’amour miséricordieux. Apprenez-moi donc à aimer véritablement, pour Dieu et en Dieu. Apprenez-moi à vous aimer, vous d’abord, avant tout et au-dessus de tout ; d’aimer de toute mon intelligence, de tout mon cœur, de toutes mes forces. Apprenez-moi à renoncer à tout ce qui vous déplaît, car tant de choses vous déplaisent encore dans mon âme, je m’en rends compte à tout instant. Seigneur, créez en moi un cœur pur, un cœur bien vierge, un cœur tout simple ; et renouvelez jusqu’au fond de mes entrailles votre esprit de droiture. Après l’expérience des années, après les désillusions de la vie, après les infidélités de l’amitié, après les ingratitudes de l’homme : je n’ai plus qu’une aspiration, et vous la connaissez bien, c’est celle de vous aimer, vous, uniquement et cela de toutes les énergies, conservées grâce à vous, de mon pauvre cœur. Que votre loi d’amour soit la lampe qui éclaire mes pas. Qu’en l’observant, sincèrement et sans réserve, j’accumule en mon cœur cet amour de vous-même afin de pouvoir le répandre autour de moi sur le prochain, en bonté, en bienveillance, en dévouement inlassable. Ainsi soit-il.
Antienne
Ã. Veníte, benedícti Patris mei, percípite regnum, quod vobis parátum est ab orígine mundi.