Le Père Annibale Bugnini (1912-1982) fait figure d’épouvantail pour le monde “traditionaliste”, en tant qu’il a été derrière toutes les réformes liturgiques de 1965 à 1975 [1]. Certains voudraient en faire également l’artisan principal des réformes précédentes, et notamment de la réforme de la Semaine Sainte approuvée par le Pape Pie XII en 1955, afin d’établir une continuité entre cette réforme et les réformes issues de Vatican 2. C’est la posture volontariste des modernistes qui prétendent légitimer le chaos liturgique qu’ils ont créé, mais aussi celle de certains “traditionalistes” qui prétendent justifier par là leur refus des réformes effectuées avant Vatican 2. Or cette attribution est fausse, tant du point de vue théologique et canonique, que du point de vue historique.
[1] Voir sa biographie par Yves CHIRON, Annibale Bugnini, Perpignan, Desclée de Brouwer, 2016, 224 pages. Dans la suite, nous indiquerons simplement : “CHIRON, Bugnini” et le numéro de page.
Cause efficiente principale et cause instrumentale [2]
En philosophie et en théologie thomistes, dans l’ordre de la cause efficiente, on distingue la cause principale et la cause instrumentale. La cause efficiente principale est l’agent qui accomplit l’action en tant que telle. La cause instrumentale a une action propre, mais elle est utilisée par l’agent principal pour un but supérieur, qui dépasse ses capacités propres. Par conséquent, l’action finale doit être attribuée, en propre et au sens strict, à la cause principale, et non à la cause instrumentale [3]. Ainsi, un instrument de musique n’est bon qu’à produire des sons, mais c’est par l’action du musicien qu’il produit véritablement une musique. De même, en ce qui concerne les lois, c’est le législateur qui doit être considéré comme leur cause principale, non pas les personnes qui travaillent à leur élaboration, car celles-ci n’ont aucun pouvoir législatif : elles peuvent produire un texte, mais pas une loi.
[3] HUGON, op. cit. en note 2, p. 692.
Le Saint-Siège : législateur en matière de liturgie
La liturgie étant la prière publique de l’Église en tant que société, il n’appartient qu’aux Autorités de l’Église d’en établir les règles, comme il est dit clairement dans le Code de Droit Canonique :
Au Saint-Siège seul, il appartient de réglementer la liturgie et d’approuver les livres liturgiques. [4]
Par Saint-Siège, il faut comprendre le Pape et les Sacrées Congrégations qui ont charge de l’assister dans le gouvernement de l’Église :
Sous le nom de Siège Apostolique ou de Saint-Siège sont désignés dans le Code non seulement le Pontife Romain, mais encore, à moins que la nature des choses ou le contexte n’indiquent le contraire, les Congrégations, Tribunaux et Offices par lesquels le Pontife romain a coutume de traiter les affaires de l’Église universelle. [5]
Dans le domaine liturgique, le pouvoir de légiférer appartient à la Sacrée Congrégation des Rites :
La Sacrée Congrégation des Rites a le droit d’examiner et de décider tout ce qui a directement rapport aux rites sacrés et aux cérémonies de l’Église latine. [6]
Le pouvoir d’approuver des réformes liturgiques appartient donc de plein droit au Saint-Siège, qui doit être considéré comme leur cause principale.
[4] Codex Iuris Canonici, Roma, Typis Polyglottis Vaticanis, 1917, canon 1257. Désormais abrégé en CIC.
[5] CIC, canon 7.
[6] CIC, canon 253 §1.
Les Commissions d’experts : instruments au service du Saint-Siège
Chaque Congrégation peut faire appel à des experts réunis en commissions, comme on le constate depuis le Concile de Trente. Dans le domaine liturgique, ces commissions ont pour but d’établir des rapports sur des sujets particuliers, ou de préparer des réformes qui sont présentées au Saint-Siège en vue d’une éventuelle promulgation. Le Saint-Siège les utilise pour l’élaboration des lois, mais elles n’ont aucun pouvoir législatif. Elles sont donc des causes instrumentales.
Par conséquent, au sens strict, il faut attribuer les réformes de 1955 au Saint-Siège, et, in fine, à Pie XII, Pape régnant au moment de leur promulgation, non pas à la Commission chargée de les préparer. D’ailleurs, par exemple, il ne vient à l’esprit de personne, de parler de “Bréviaire de Piacenza”[7] pour évoquer le Bréviaire de Saint Pie X. Parler de “Semaine Sainte de Bugnini” est donc faux, au sens propre, du point de vue théologique et canonique. C’est aussi faux historiquement, même du point de vue de la cause instrumentale, car Bugnini n’a eu aucune influence dans la Commission pour la réforme liturgique créée à la demande du Pape Pie XII.
[7] Mgr Pietro Piacenza est né le 21 janvier 1847 à Castel San Giovanni, et décédé à Piacenza le 22 août 1919. Protonotaire apostolique attaché à la Sacrée Congrégation des Rites à partir du 4 janvier 1904, il peut être considéré comme la cheville ouvrière principale de la réforme du Bréviaire Romain et du calendrier liturgique, approuvée par Saint Pie X en 1911 et 1913. Voir Honoré VINCK, Pie X et les réformes liturgiques de 1911-1914, Münster, Aschendorff Verlag, 2014, pp. 101-110 pour la biographie de Mgr Piacenza.
La place de Bugnini dans la Commission de Pie XII est très modeste
Le 10 mai 1946, le Pape Pie XII donne l’ordre au Cardinal Carlo Salotti (1870-1947), préfet de la Sacrée Congrégation des Rites (SCR), de préparer un projet concret de réforme générale de la liturgie. Les rapporteur et vice-rapporteur de la Section historique de cette Sacrée Congrégation [8], les Pères Ferdinando Antonelli O.F.M. (1896-1993) [9], et Josef Löw C.Ss.R. (1893-1962), sont alors chargés de la rédaction d’un Mémoire sur la réforme liturgique [10].
Le 28 mai 1948, Pie XII demande au nouveau préfet de la SCR, le Cardinal Clemente Micara (1879-1965), de constituer une Commission Pontificale pour la réforme liturgique [11]. Cette Commission, présidée par le Cardinal préfet en personne, est composée de Mgr Alfonso Carinci (1862-1963), secrétaire de la SCR, du Père Antonelli, du Père Löw, de Dom Albareda O.S.B. (1892-1966), préfet de la Bibliothèque Vaticane, du Père Augustin Bea S.J. (1881-1968), de l’Institut Biblique Pontifical, et du Père Bugnini C.M., directeur des Ephemerides Liturgicæ. Il est demandé aux membres de cette Commission de garder le secret sur ses travaux, comme le prévoit le Code de Droit Canonique [12]:
Tous ceux qui font partie des Congrégations, tribunaux ou offices de la Curie romaine sont tenus d’observer le secret, dans les limites et d’après la manière déterminée par la discipline particulière à chacun d’eux.
Bugnini, absent lors de la première réunion, est nommé secrétaire de la Commission lors de la deuxième [13]. L’abbé Anthony Cekada (1951-2020) a cru pouvoir démontrer — sans aucune référence à l’appui — la mainmise de Bugnini sur cette Commission uniquement en raison de ce titre de secrétaire [14]:
Dans les rouages administratifs du Vatican, le Secrétaire occupe une position stratégique. (…) Dans la pratique, c’est le Secrétaire qui organise et supervise le travail quotidien du groupe : il a ainsi toute latitude pour orienter les politiques ou peser sur les dispositions prises par son département.
C’est ainsi que Bugnini (…) se trouva au poste de commande de la réforme liturgique.
Or, ce n’est pas le nom qu’il faut considérer mais la réalité historique. Bugnini lui-même ne s’attribue pas une place prépondérante dans la Commission de Pie XII [15]. De même, pour la période de 1948 à 1960, le Chanoine Aimé-Georges Martimort (1911-2000), un de ses proches amis, ne considère Bugnini que comme un “témoin” des réformes, et non un “acteur principal” [16]. Cette fonction de secrétaire de la Commission de Pie XII correspond à des tâches pratiques, aucunement à un rôle de direction, comme l’explique Yves Chiron [17]:
Plus tard, Bugnini aura les mêmes fonctions de secrétaire dans la Commission préparatoire conciliaire sur la liturgie et dans le Consilium post-conciliaire pour la réforme liturgique. Mais, si dans la Commission préparatoire comme au Consilium, il eut un rôle déterminant, dans la Commissio Piana il n’eut en rien un rôle de premier plan. Il y fut un précieux exécutant et intervint peu dans les débats. Il apprit et observa beaucoup, il prit sans doute conscience de certains problèmes, mais il n’eut jamais une influence décisive.
[8] La Section historique de la SCR est instituée par le Pape Pie XI en 1930, dans le but d’étudier les causes historiques des saints et de corriger les livres liturgiques.
[9] Voir l’ouvrage de Nicolas GIAMPIETRO, Le cardinal Ferdinando Antonelli et les développements de la réforme liturgique de 1948 à 1970, Versailles, APOC-Le Forum, 2004. Dans la suite, nous indiquerons simplement : “GIAMPIETRO, Antonelli” et le numéro de page.
[10] Memoria sulla riforma liturgica, Roma, Tipografia poliglotta vaticana, 1948. On en trouve la réimpression dans Carlo BRAGA, La riforma liturgica di Pio XII, Documenti, Roma, Centro Liturgico Vincenziano, 2003, pp. 3-343.
[11] Sur l’origine et la constitution de la Commission, on peut se référer aux papiers personnels d’Antonelli, dans GIAMPIETRO, Antonelli, pp. 376-378.
[12] CIC, canon 243 §2.
[13] GIAMPIETRO, Antonelli, p. 383.
[14] Abbé Anthony CEKADA, La messe de Paul VI en question, Le Chesnay, Via Romana, 2021, p. 71.
[15] Annibale BUGNINI, La réforme de la liturgie (1948-1975), Perpignan, Desclée de Brouwer, 2015, pp. 25-28 ; dans la suite, nous indiquerons simplement : “BUGNINI, La réforme” et le numéro de page. On voit ici le peu de pages consacrées par Bugnini à la Commission de Pie XII, et il se montre très imprécis sur ce sujet.
[16] Aimé-Georges MARTIMORT, L’histoire de la réforme liturgique à travers le témoignage de Mgr Annibale Bugnini, dans La Maison Dieu, n°162, Paris, éditions du Cerf, 1985, p. 126.
[17] CHIRON, Bugnini, p. 44.
Le Mémoire sur la réforme liturgique n’est pas l’œuvre de Bugnini
Commencé dès 1946, alors que Bugnini n’avait aucun rapport avec la SCR, le Mémoire sur la réforme liturgique est daté du 30 décembre 1948, et signé par le Père Antonelli, contrairement à l’attribution qu’en fait Bugnini au Père Löw [18]. Bugnini n’a participé à cette publication que par la relecture des épreuves et la compilation de l’index analytique [19]. L’impression est terminée le 25 juin 1949, et la deuxième réunion est fixée après les vacances pour que les membres de la Commission puissent étudier le document [20]. Lors d’une audience, le 22 juillet 1949, le Cardinal Micara et le Père Antonelli présentent une copie reliée du Mémoire au Pape Pie XII [21].
[18] BUGNINI, La réforme, p. 25. Concernant cette attribution exclusive au P. Löw, l’Abbé Cekada (op. cit. en note 14, p. 71) répète les propos de Bugnini, en dépit de la présence du “Mémoire” et du livre de Giampietro dans la bibliographie à la fin de son livre.
[19] Memoria sulla riforma liturgica, op. cit. en note 10, p. 318 ; traduction dans GIAMPIETRO, Antonelli, p. 44.
[20] GIAMPIETRO, Antonelli, p. 46.
[21] GIAMPIETRO, Antonelli, p. 46, note 40.
Bugnini n’intervient quasiment pas lors des réunions
Si on examine les procès-verbaux des 82 réunions de la Commission, tenues du 22 juin 1948 au 8 juillet 1960 [22], il apparait que Bugnini intervient très peu : six fois nommément, et uniquement sur des points de détail concernant le calendrier liturgique [23]. Jamais il n’intervient dans les discussions concernant les réformes de la Semaine Sainte. Les réunions sont présidées systématiquement par le Cardinal préfet, et les discussions sont ordinairement dirigées par le Père Antonelli. Le Pape est informé des avancées de la Commission par le Cardinal préfet de la SCR en personne, lors d’audiences régulières. Les propos de Bugnini [24] affirmant que le Pape était tenu au courant par Mgr Montini et le Père Bea sont démentis par les procès-verbaux qui témoignent des audiences du Cardinal préfet avec Pie XII. En outre, Mgr Montini, écarté de la Curie romaine en 1954, n’avait rien à voir avec cette Commission [25]. Quant au Père Bea, il faut rappeler que le rôle de confesseur du Pape est une fonction qui regarde le for interne, et non les affaires de l’Église.
[22] GIAMPIETRO, Antonelli, pp. 381-528.
[23] Concernant le nom de la fête de Noël (GIAMPIETRO, Antonelli, p. 388), l’évangile de la Messe du jour de Noël (GIAMPIETRO, Antonelli, p. 389), l’office des quatre premiers jours de Carême (GIAMPIETRO, Antonelli, p. 392), sur la fête de Marie Reine (GIAMPIETRO, Antonelli, p. 446), sur le regroupement de saints docteurs en une seule fête (GIAMPIETRO, Antonelli, p. 459), sur la préparation immédiate à Noël (GIAMPIETRO, Antonelli, p. 461).
[24] BUGNINI, La réforme, p. 27.
[25] Il ne sert qu’une seule fois d’intermédiaire entre la Commission et le Pape : au sujet de la fête de Marie Reine, en avril 1954 (procès-verbal de la 38ème réunion, dans GIAMPIETRO, Antonelli, p. 464).
Bugnini n’a pas préparé les textes de la Semaine Sainte de 1955
Fin 1950, la SCR est sollicitée pour une réforme de la Vigile Pascale, notamment quant à l’heure de sa célébration, à la suite de multiples demandes de la part des épiscopats français et allemands en particulier [26]. À ce moment, la Section historique de la SCR travaillait depuis presque cinq ans à réunir la documentation nécessaire pour les réformes liturgiques à accomplir. Le Mémoire sur la réforme évoquait la question du Triduum sacré, et en particulier du Samedi-Saint [27], et les paragraphes concernés avaient été brièvement passés en revue par la Commission lors de sa 6ème réunion, le 27 janvier 1950 [28]. Ainsi, lors de ses 9ème et 10ème réunions, les 23 et 30 janvier 1951, la Commission étudie le projet proposé par le Père Antonelli pour la réforme de la Vigile Pascale [29]. Le 9 février, le Cardinal Micara présente le schéma au Pape Pie XII, qui l’approuve : le décret de la SCR permettant l’usage de cette réforme est daté du même jour [30]. Suite aux retours favorables et aux remarques de l’épiscopat, l’Ordo de la Vigile Pascale restaurée est de nouveau étudié par la Commission lors des réunions suivantes (11ème à 14ème) [31]. Après quelques modifications, la permission d’utiliser ce rite est prorogée pour les années suivantes par des décrets successifs [32].
Le 18 octobre 1952, la Commission commence l’étude de la réforme des rites des Jeudi et Vendredi Saints, le procès-verbal de cette 24ème réunion permet de démontrer que Bugnini n’a pas élaboré ce projet de réforme :
Le T. R. P. Antonelli, Rapporteur général, expose le thème de la réunion, c’est-à-dire l’étude du transfert des rites des Jeudi et Vendredi Saints au soir de ces deux journées. Un projet correspondant à ce sujet, élaboré par le T. R. P. Löw en collaboration avec le T. R. P. Antonelli, a été distribué au cours des jours précédents aux membres de la Commission. Ce document comprend deux parties : d’une part, les Ordinationes qui introduisent le rite ; celles-ci seront examinées au cours de cette réunion ; et, d’autre part, l’Ordo, avec les textes et les rubriques, qui sera présenté à la Commission sous la forme de propositions.
Le T. R. P. Rapporteur général rappelle que, en juillet dernier, le Saint-Père avait déjà autorisé la Commission à étudier le problème de la réforme des Jeudi et Vendredi Saints, qui avait été demandée par différents Évêques. [33]
Les réunions suivantes (25ème à 28ème) poursuivent sur le même sujet. L’examen d’un projet de réforme du Dimanche des Rameaux n’est abordé que lors de la 40ème réunion, le 11 mai 1954, et là encore, il est démontré, sans ambiguïté, que Bugnini n’en est pas l’auteur :
On passe ensuite à l’examen du projet de réforme des rites du dimanche des Rameaux. Le T. R. P. Löw, en collaboration avec le T. R. P. Antonelli, avait préparé et distribué aux membres de la Commission un “promemoria” avec l’exposé historique et les lignes générales du rite réformé. [34]
Le procès-verbal de la 45ème réunion (19 octobre 1954) témoigne, une nouvelle fois, de l’implication personnelle du Pape Pie XII :
Son Éminence [le Cardinal Gaetano Cicognani (1881-1962), préfet de la SCR depuis le 7 décembre 1953] déclare que, au cours de l’audience du 18 août, il a exposé au Saint-Père la question de la réforme de la Semaine Sainte, en soulignant les deux points les plus importants et controversés, à savoir, en ce qui concerne le Jeudi Saint, la question des sépulcres, et pour le Vendredi Saint la communion des fidèles. Après avoir lu le document préparatoire réalisé par le T. R. P. Rapporteur Général et par le P. Löw, le Saint-Père a fait savoir que les difficultés relatives aux points mentionnés ne lui semblaient pas insurmontables ; toutefois, il a ajouté qu’il désirait que la question dans son ensemble fût soumise aussi à l’examen des Cardinaux de la SCR. [35]
Le projet final est discuté lors des 51ème à 55ème réunions, de juin à octobre 1955. Les Cardinaux de la SCR, réunis en Congrégation générale le 29 juillet 1955, examinent le texte préparé par les Pères Antonelli et Löw, et approuvent la réforme. Quelques derniers ajustements sont effectués avant la publication du Décret “Maxima Redemptionis”, le 16 novembre 1955 [36].
Les documents cités prouvent, du point de vue historique, que Bugnini n’est pas à l’origine de la Commission pour la réforme liturgique de Pie XII, qu’il n’est pas le rédacteur du Mémoire sur la réforme liturgique, base de travail de cette Commission, que son rôle de secrétaire n’était qu’un rôle d’exécutant et non de dirigeant, qu’il n’a pas rédigé les projets de réforme de la Semaine Sainte approuvés en 1955, et qu’il n’a eu aucune part dans leur conception. De plus, il ressort de ces documents historiques, que cette réforme de la Semaine Sainte a été faite sous le contrôle attentif du Pape Pie XII, et selon les procédures les plus strictes de la Curie romaine.
[26] GIAMPIETRO, Antonelli, pp. 69-70.
[27] Memoria sulla riforma liturgica, op. cit. en note 10, pp. 58-76.
[28] GIAMPIETRO, Antonelli, pp. 394-396.
[29] GIAMPIETRO, Antonelli, pp. 401-406.
[30] Acta Apostolicæ Sedis (ci-après AAS), vol. 43, Cité du Vatican, 1951, pp. 128-129.
[31] GIAMPIETRO, Antonelli, pp. 406-412.
[32] AAS, vol. 44, 1952, pp. 48-52 ; vol. 47, 1955, p. 48.
[33] GIAMPIETRO, Antonelli, p. 429.
[34] GIAMPIETRO, Antonelli, p. 469.
[35] GIAMPIETRO, Antonelli, p. 477.
[36] AAS, vol. 47, 1955, pp. 838-841 ; traduction française de l’Osservatore Romano, du 9 décembre 1955. Voir ici.
Conclusion
L’expression “Semaine Sainte de Bugnini” correspond à un mode de communication qui a pour but de jeter l’opprobre sur les réformes liturgiques de 1955. Elle permet d’effacer la figure du Pape Pie XII afin de se dédouaner du devoir d’obéissance à ses réformes [37]. Ce mode de communication n’est pas admissible, car il ne repose pas sur la vérité théologique et canonique qui établit le Saint-Siège, et donc le Pape, comme législateur en matière de liturgie ; il ne repose pas non plus sur la vérité historique qui établit que Bugnini n’a eu aucune influence dans la préparation de ces réformes.
Refuser, discuter et critiquer la restauration de la Semaine Sainte par le Pape Pie XII est une attitude périlleuse. Notre attitude doit être fondée sur la docilité au Magistère de l’Église, docilité qui nous maintient dans un esprit catholique en l’absence actuelle de véritable successeur de Pierre, et nous dispose le mieux à la docilité à un futur véritable successeur de Pierre.
La docilité aux dispositions et directives du Pape Pie XII en matière de liturgie nous rend aptes à rejeter Vatican 2 et sa nouvelle liturgie, lui qui dénonçait :
non sans préoccupation et sans crainte, que certains sont trop avides de nouveauté et se fourvoient hors des chemins de la saine doctrine et de la prudence. Car, en voulant et en désirant renouveler la sainte liturgie, ils font souvent intervenir des principes qui, en théorie ou en pratique, compromettent cette sainte cause, et parfois même la souillent d’erreurs qui touchent à la foi catholique et à la doctrine ascétique. [38]
La docilité aux dispositions et directives du Pape Pie XII en matière de liturgie nous préserve également d’un “traditionalisme” malsain, lui qui dénonçait :
Sans doute, la liturgie de l’antiquité est-elle digne de vénération ; pourtant, un usage ancien ne doit pas être considéré, à raison de son seul parfum d’antiquité, comme plus convenable et meilleur, soit en lui-même, soit quant à ses effets et aux conditions nouvelles des temps et des choses. [39]
En somme, pour reprendre les propos d’un spécialiste de l’histoire de la liturgie, quelque peu désemparé face à la réforme novatrice du Bréviaire romain par Saint Pie X :
Nous serions indignes du nom de catholiques, si nous demeurions, même un seul instant, oscillants (titubanti) entre l’obéissance filiale à la parole décisive du Souverain Pontife et l’attachement, même justifié, à la vénérable antiquité. [40]
[37] La Semaine Sainte restaurée par Pie XII en 1955 est la loi liturgique en vigueur aujourd’hui, parce qu’elle n’a jamais été abrogée, ni par Jean XXIII, qui la reprend intégralement avec seulement de très rares modifications secondaires, ni par Paul VI qui n’était certainement pas Pape au moment où il promulgue sa nouvelle liturgie (voir R. P. M.-L. Guérard des Lauriers, Le siège apostolique est-il vacant ?, dans Cahiers de Cassiciacum, n°1, Nice, Association Saint-Herménégilde, 1979, pp. 4-99).
[38] Encyclique Mediator Dei, du 20 novembre 1947, dans Les enseignement pontificaux, La Liturgie, présentation et tables par les moines de Solesmes, Tournai, Desclée & Cie, 1961, p. 323, §514.
[39] Encyclique Mediator Dei, édition citée en note 38, p. 349, §548.
[40] Propos d’Anton Baumstark (1872-1948) cité dans Honoré VINCK, op. cit. en note 7, p. 408.